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Retour programme du Printemps des Arts 2023

Renée Robitaille

La petite histoire des Hommes de pioche

J’ai grandi dans le fond d’un rang, à Évain, en Abitibi-Témiscamingue. Mes parents avaient acheté une petite maison de bois sur une terre agricole. Là, nous avons eu des serres et cultivé des jardins pendant plusieurs années. Mon père engraissait aussi quelques veaux de lait, pendant que mon frère et moi pourchassions les couleuvres et les lièvres et construisions des cabanes dans le bois. Ma mère, elle, nous partageait son amour pour les plantes, les fleurs sauvages et les champignons. Chaque été, nous cueillions des fraises des champs, des framboises, des bleuets, des pétales de roses pour en faire d’innombrables pots de confitures et de gelées. Mes parents avaient aussi déniché une vieille chaloupe dans laquelle nous flânions, des journées entières,  taquinant le brochet et le doré.

Puis, mon père a été promu. Nous avons dû quitter l’Abitibi pour aller nous installer tout près de Montréal. Pour l’adolescente que j’étais devenue, ce fut une véritable ouverture sur le monde : la vie culturelle, les spectacles, les cafés, les marchés, les boutiques. La vraie vie, quoi.

La vie à la grande ville était pour moi une occasion toute neuve et essentielle de m’épanouir en tant que jeune femme et artiste en devenir. L’Abitibi était bien rangée dans les lointains tiroirs de mon enfance et j’étais heureuse de pouvoir enfin tracer mon chemin dans un contexte aussi stimulant que celui de Montréal.

Et le temps a passé.

Un jour, j’ai eu des enfants. Je les ai trimballés partout en ville : dans les cafés, les spectacles, les marchés, les boutiques, le trafic. Nous passions nos étés à explorer les terrains de jeux et les barbotteuses du quartier Rosemont, à Montréal.  

Puis, je me suis souvenue des espaces sauvages et de la liberté qui avaient marqués mes jeux de petite fille. C’est ce qui m’a convaincue d’enfin retourner en Abitibi car, je dois l’admettre, je n’y étais jamais retournée depuis l’adolescence. J’en avais mis du temps, mais j’avais maintenant besoin de présenter à mes enfants les lieux où j’avais grandi.  J’ai d’abord passé quelques jours en Abitibi, puis, de spectacles en projets, j’y suis restée plusieurs semaines.

Et chaque fois que je discuttais avec les gens là-bas, mon coeur battait très fort car je réalisais que ces hommes et ces femmes possédaient une grande chose que moi, je n’avais pas. La fierté. Ces gens-là portaient fièrement dans leurs discours, l’histoire de leur région, leur passé, racines.

Pourquoi, n’avais-je pas emporté la fierté dans mes valises lorsque j’ai quitté ma région natale ?

De retour à Montréal, j’ai compris qu’il me fallait plonger dans un grand projet pour me réapproprier les richesses de mon enfance. J’avais envie d’écrire et de raconter mon Abitibi.

Ceux qui ont déjà franchi la barrière du Parc Lavérendrye sauront de quoi je parle : lorsqu’on arrive enfin en Abitibi, après d’interminables heures de voiture (peu importe d’où l’on vient, c’est toujours loin, l’Abitibi), on reste marqué par la chaleur de l’accueil que nous réservent ses habitants.  Et que dire de leur sourire... Malgré toutes mes tournées dans toutes les régions du Québec, je n’ai jamais revu des sourires aussi sincères et profonds que ceux qu’on m’a offert en Abitibi. J’ai été charmée par les gens de ce pays, qui me semblait-il, ne demandaient qu’une oreille pour partager leurs histoires.

C’est dans les entrailles de la terre que j’ai eu envie de descendre pour mesurer la profondeur de mes racines. J’y ai rencontré les hommes de pioches, qui m’ont partagé leur monde souterrain, comme on entrouvre une boîte à secrets. Ils m’ont ensuite invitée dans les tavernes, où tout naturellement, comme s’ils me côtoyaient depuis toujours, m’ont raconté leurs vies.

Ce livre, c’est ma manière à moi de leur rendre hommage et de les remercier pour leur générosité et leur confiance. Messieurs, votre fierté aura été pour moi, la plus belle opportunité de replonger au coeur de mon histoire. Je lève mon verre à votre santé, souvent durement éprouvée, chers amis.  

Renée Robitaille



Renée Robitaille a grandi en Abitibi-Témiscamingue, terre des Premières Nations. Depuis 1999, elle parcourt les scènes internationales pour présenter ses créations au sein de festivals de contes et de théâtre.
Plusieurs maîtres l’ont guidée dans son parcours professionnel. C’est avec Michel Faubert et Louis Champagne qu’elle fait ses premières armes dans le conte théâtral et la création de personnages. Plusieurs années de formation auprès de Didier Kowarsky et de Robert Favreau lui permettent de raffiner sa présence en scène et sur les plateaux de tournage. Renée explore actuellement du côté de la marionnette et du jeu masqué, différentes formes de langages scéniques qu’elle marie harmonieusement aux Arts de la parole.

Titulaire d’une maîtrise en communication, Renée est également reconnue pour ses talents d'autrice. Elle publie depuis 20 ans de nombreux livres audios de contes et des albums jeunesse principalement édités chez Planète rebelle, Shcolastic, Bayard et La Bagnole.

En parallèle, Renée se forme au Qi Gong depuis plusieurs années. Elle y acquiert les bases de la médecine traditionnelle chinoise et de la méditation en mouvement auprès de l’école Fragments libres. C’est en pratiquant les arts martiaux avec ses trois garçons qu’elle se découvre une passion pour le Taekwondo et gravit graduellement les échelons pour devenir ceinture noire dans cette discipline en 2017. Renée se passionne aussi pour l’herboristerie et la permaculture, domaines qui lui permettent de se ressourcer chaque été, auprès de ses canards, ses poules et ses plantes médicinales.

Voir le site de Renée Robitaille

HOMMES DE PIOCHE

Titulaire d’un BAC en musique et en conception sonore, Étienne LORANGER a présenté ses créations musicales sur les scènes de France, du Canada, de Russie et  d’Arménie. Il tourne notamment avec des conteurs, des troupes de danse et des groupes de musique depuis plus de 25 ans. Il collabore aux projets de la maison d’édition Planète rebelle depuis sa fondation, à titre de réalisateur, concepteur sonore et compositeur. Il a créé les univers sonores d’une vingtaine de disques pour la jeunesse et pour les adolescents. Il est également professeur de musique au CÉGEP Saint-Laurent.


Etienne Loranger aborde la création sonore comme on raconte une histoire. Il crée ses musiques dans l’optique d’offrir une dimension nouvelle au récit. La narration est enrobée d’ambiances réalistes ou abstraites, en jouant sur la texture, la profondeur et la couleur des sons. Cette exploration des diverses sonorités permet de réaliser de multiples déclinaisons avec des instruments acoustiques ou électroniques et de mettre en place des variations auditives inusitées. Le texte devient un fabuleux terrain d’expérimentation et de jeu. Le défi est de redonner toute leur puissance aux mots, sans les alourdir, mais en leur offrant un espace, un souffle, avec une deuxième voix musicale.

Etienne Loranger

Photos de Renée Robitaille: Jean Demers  

Photos de Etienne Loranger: Frédérique Bérubé